



Voila enfin la bête en peinture et en sculpture ! C'est écrasant, monumental ! La tête constamment levée pour pouvoir observer le monstre, le sang y circule moins bien et les images que nous offre le retable sont encore plus perturbantes ainsi. Des monstres tolkienesques, un Jésus en souffrance et en putréfaction, des couleurs vives, une robe rouge sang pour Marie, un vert vérolé habille le corps meurtri et écartelé sur la croix, des monstres/anges à plumes... Cette virée à Colmar devient décidément de plus en plus passionnante.
Le retable d'Issenheim (ou d'Isenheim), consacré à saint Antoine, provient du couvent des Antonins à Issenheim, au sud de Colmar, où il ornait le maître-autel de l’église de la commanderie. Il est est l’œuvre de deux grands maîtres du gothique tardif : le peintre allemand Matthias Grünewald, dont il constitue incontestablement le chef-d'œuvre, pour les panneaux peints (1512-1516) et Nicolas de Haguenau pour la partie sculptée (autour de 1500).
Le retable est constitué d'un ensemble de plusieurs panneaux peints qui s’articulent autour d’une caisse centrale composée de sculptures.
Le retable d'Issenheim est une œuvre de grandes dimensions, 3,30m de haut et 5,90m de large. Il comprend une double série de volets qui s'ouvrent sur la caisse sculptée. Afin d'en faciliter l'observation et d'éviter de trop nombreuses manipulations préjudiciables aux charnières les trois ensembles sont présentés séparément. Leur installation dans la nef de l'église de l'ancien couvent d'Unterlinden restitue partiellement la présentation originelle du retable.
Le retable femé représente la Crucifixion
La première ouverture du retable est constituée de quatre panneaux qui représentent, de gauche à droite, l'Annonciation, la Nativité et le concert des anges, la Résurrection. L'Annonciation se déroule dans une église gothique du type de celles de la région du Rhin supérieur.
La Nativité occupe les deux panneaux centraux de la première ouverture. C'est une nativité originale, sans étable, sans âne ni bœuf. Assise dans un jardin clos qui rappelle sa virginité, Marie, à la fois monumentale dans sa robe rouge, et tendre, tient l'enfant Jésus dans ses bras. Une émotion intense se dégage de ses gestes et surtout des regards qui plongent l'un dans l'autre.
Le traitement de la Résurrection n'est pas moins original que celui de la nativité. Grünewald délaisse la description naturaliste de la sortie du tombeau au profit de l'expression d'un mouvement puissant. Seule l'extrémité du linceul est encore dans le tombeau ouvert tandis que Christ s'élance en l'air, comme libéré de toute attache terrestre. La lumière jaillissant de ses mains, de ses pieds et du côté, il apparaît dans un halo doré. Par cette situation entre ciel et terre, par cette illumination, Grünewald traduit picturalement le verset de L'Evangile de Matthieu (17.2) : " Et il fut transfiguré devant eux. Et sa face brilla comme le soleil ". Cette représentation associe Résurrection, Ascension et Transfiguration.


